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"Il faut leur marcher dessus"

PSG-OM 20 décembre 1992, c'est ce qu'Arthur Jorge, entraîneur des Parisiens, a demandé à ses joueurs. Terrible erreur : il a décuplé la volonté des Olympiens, le match tourne au massacre...

 

C'est le match d'un plaisir un peu masochiste, celui d'assister à un jeu de massacre loin de la saveur d'un football technique, offensif, généreux. Mais celui aussi de la punition d'un élève trop présomptueuse infligée par un maître maladroitement remonté par ceux qui espéraient le déboulonner.

C'est sûrement le pire PSG-OM de l'histoire. Sur le terrain du moins, car dans les tribunes ou dans les rues, on a vécu des moments plus effrayants, plus honteux au cours des vingt ans qui ont suivi. Mais ce qui n'était pas encore qualifié de Clasico devait faire un peu honte à certains de ses protagonistes quelques années plus tard, comme nous l'avait avoué Didier Deschamps. "Si aujourd'hui, on faisait les tacles de l'époque, on nous mettrait directement en prison", estime avec humour Eric Di Meco.

Mais, comme le soulignait le facétieux Raymond Goethals en cette soirée d'hiver après les hostilités : "J'ai lu dans les journaux, hein, que les Parisiens allaient marcher sur la tête de Desailly, de Casoni, de Boli et de Di Meco. Je ne sais pas si c'est vrai, mais ça, ce n'est pas du football et pour réussir à faire ces choses-là, il faut être drôlement costaud, hein ! nous n'étions pas entrés sur le terrain pour donner des coups mais il n'était pas question que nous nous contentions d'en prendre"

"Les mots qu'il ne fallait pas employer"

Tout était parti d'une interview d'Arthur Jorge, voulant "surmotiver" ses joueurs, se posant en rivaux de l'OM, qui restait sur quatre titres de champion consécutifs. L'entraîneur parisien avait tenu un discours guerrier parce qu'il avait compris que c'était ce qui faisait la différence entre l'OM et le PSG, et qu'il voulait faire passer un palier à son équipe, explique Bernard Casoni. 'Guerrier'', nous 'marcher dessus', c'était les mots qu'il ne fallait pas employer, car c'était notre point fort, il nous a plus motivés qu'autre chose. Nous avions notre orgueil, du style 'tu vas voir à qui tu as affaire'. Sur le rapport de forces, nous avons été impressionnants, alors que nous sortions d'un période un peu difficile et que là, il nous a fait faire un pas en avant".

 

 

Un but de Boksic et rideau

En l'occurrence, peut être le PSG aussi a-t-il progressé et tiré les leçons de ce match là, dans sa carrière européenne, qui l'a mené en quart et en demi à plusieurs reprises dans les années 90. "C'était notre plus, nous avions l'habitude du niveau européen, nous mettions beaucoup d'intensité dans les duels, moi j'y allais pour faire mal", reconnaît Bernard Casoni, "même si, eux aussi, avaient quelques joueurs qui mettaient des coups."

On peut ainsi rappeler le genou en avant de Ricardo dans les duels aériens, dans le dos des adversaires, ce qui ne l'empêchait pas d'être un grand défenseur et un homme charmant. L'OM a eu le bonheur de marquer sur un petit coup de tête de Boksic, au milieu de la première période, se permettant ensuite de gérer son avantage.

Sans un immense Bernard Lama fans le but parisien, attrapant du bout des doigts un ballon que Pelé s'apprêtait à frapper, l'OM aurait même doublé la mise en seconde période, en pleine corrida. "C'est vrai que lors qu'on revoit certaines images, ça fait peur", admet Casoni. Qui ajoute : "Il y avait toutefois beaucoup mains de simulations, de joueurs qui pleurent au moindre contact comme aujourd'hui". L'arbitrage était beaucoup plus laxiste, les joueurs moins protégés.

Mais on en revient toujours aux propos d'Arthur Jorge, qui était pourtant un homme très intelligent et avait manqué de clairvoyance, comme Bernard Casoni le faisait remarquait déjà, juste après le match : "Pour nous, le danger, c'est quand on affronte une équipe qu'on croit plus faible. Là, j'ai pris mon pied, Ils avaient dit que ça allait être l'enfer et voilà le résultat des courses. Ne dites pas que nous n'ayons plus faim, des succès j'en veux encore et toujours". "A force de nous promettre l'enfer, c'est eux qui l'on connu", Renchérissait Franck Sauzée.

Bernard Tapie, pour sa part, buvait du petit lait : "La causerie d'avant match a été très simple, je leur ai dit : 'Vous prenez votre montre et vous la mettez à l'heure". Je ne pas surpris car cette équipe est toujours exacte aux grands rendez-vous". "Ce succès en appellera d'autres après la trêve", affirmait aussi Jean Jacques Eydelie.

 

Au centre de la polémique, Eric Di Meco expliquait que son remplacement par Manuel Amoros avait été motivé par la crainte d'un carton rouge : "Ils ne s'attendaient tout de même pas à ce qu'on leur fasse des ronds de jambes et qu'on les laisse jouer ?"

Quelques mois plus tard, chose inimaginable aujourd'hui, en août 1993, alors que l'OM revenait de Nantes, nous nous étions arrêtés à Paris pour aller faire un tour au Camp des Loges, car le PSG venait jouer à Marseille quelques jours plus tard. Après quelques interviews, l'ex-Olympien Laurent Fournier avait invité les deux envoyés spéciaux du "Provencal" à déjeuner chez lui où Alain Roche nous avait rejoints pour le café. Ils nous avaient dit : "Eric, on l'aime bien, c'est vraiment un bon copain, mais comment a -t-il pu terminer sans carton rouge ?"'

Houiller, Denisot, Le Graet...

D'autres avaient pris moins de gants en décembre 92, comme Bernard Lama :"Ils n'ont pensé qu'à donner des coups, c'est honteux, devant des milliers de jeunes. Ils donnent l'image de ceux qui les dirigent". Interrogé sur le problème que pouvait poser la cohabitation entre Marseillais et Parisiens en équipe de France, le sélectionneur, Gérard Houiller avait rétorqué : "Di Meco n'est pas en équipe de France". Avec le recul, on peut se demander si lors de France-Bulgaire de novembre 93, Kostadinov aurait marqué avec le Vauclusien en face. Question de pertinence de choix. Aimé Jacquet avait tranché : dès la reprise de fonction, il avait rappelé Di Meco chez les Bleus.

Michel Denisot, lui, avait qualifié les Marseillais de 'voyous', s'attirant les foudres de Noël Le Graet, alors président de l Ligue, répondant que "Michel Denisot était indigne de diriger un grand club". Au fil du temps, tout cela fait bien sourire. Le match, lui, toujours pas. Autant se souvenir du 0-1, sans revoir le jeu de massacre.

Mario Albano

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