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Résumé du Petit Provencal

du 02 mai 1938

 

Jeu très dur aux Métairies où l'O.M. réalise un

excellent match nul devant Sète très en forme.

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Menés par 1 but à 0, les olympiens réussissent

l'égalisation sur penalty que transforma Vasconcellos

Sète, 1er mai - Si les matches de championnat qui se terminent sur un match nul devaient fournir un vainqueur grâce à l'avantage des corners Sète aurait enlevé aujourd'hui la décision puisqu'il en totalise dix contre deux pour les joueurs marseillais. Mais heureusement la compétition procède par nombre de points et nous nous en félicitons vivement, car il eut été foncièrement injuste que Sète s'adjugeât la victoire au prix d'un pareil subterfuge.

Le match nul réalisé pour les olympiens équivaut à une magnifique performance tant leurs adversaires mirent d'acharnement dans la recherche d'un succès. Ah ! Soyez bien sûrs que la rencontre O.M.-Sète s'est déroulée dans une atmosphère passionnée et que les consignes reçues par les joueurs phocéens furent vite oubliées en face de la nécessité de se protéger et de se défendre contre les assauts fougueux et rageurs des locaux. Rarement, si ce n'est les duels Sète-O.M. de toujours, ce match fut disputé avec autant d'ardeur dans les rangs sétois et l'ambiance communicative d'un public outrageusement chauvin lui donna bientôt l'allure d'une réelle corrida.

Le responsable de cette dégénération d'un match qui a été beau mais qui aurait pu être correct, est M. Conrie dont l'arbitrage, par trop favorable aux locaux, a soulevé la réprobation unanime des supporters phocéens. Nous n'hésitons pas à écrire que les dirigeants olympiens sont dans l'obligation d'exiger la récusation de M. Conrie pour la finale de la Coupe si l'on veut que l'arbitrage ne soit pas mis en cause quant à son influence sur le résultat. Nous avons beaucoup de peine à porter une telle appréciation, mais il y a des sanctions ahurissantes qui ne peuvent laisser muets même les plus placides et nous ne sommes guère. Ceci d'ailleurs excusera peut être cela.

Bien partis, les dauphins nous donnèrent une excellente exhibition de football souligné cependant par trop d'irrégularité, puis l'équipe locale fléchit pour se reprendre vigoureusement à la fin du match. En comparaison de la partie des Sétois, le match des Marseillais prend un relief considérable qui nous autorise à affirmer que nos joueurs ont donné le meilleur d'eux-mêmes et se sont dépensés sans compter pour la cause de leur club. Les Marseillais ont prouvé cet après-midi que leur réputation n'est pas surfaite et que leurs chances sont grandes d'enlever la coupe de France. Toute l'équipe a joué avec un admirable et si l'attaque n'a pas pu prendre en défaut la défense sétoise, il faut en imputer la responsabilité à l'habile tactique défensive de celle-ci. Notre arrière défense s'est montrée impeccable et c'est sur une brillante performance que les blancs ont terminé le championnat hors de leurs murs.

Les équipes

Les métairies sont pleines d'une foule vibrante qui prend difficilement place d'ailleurs dans l'enceinte étroite du stade quand les équipes pénètrent sur le terrain, applaudies chaleureusement comme le veut la coutume sportive.

M. Conrié module le coup de sifflet du garde à vous, et les deux onze s'alignent dans la formation suivante :

F.C Sète : Llense ; Mercier et Franques ; Charles, Balmanya et Laurent ; G. Dard, Raich, Koranyl, Brusseaux et Danzelle.

O. Marseille : Vasconcellos ; Ben Bouali et Conchy ; Bastien, Bruhin et Gonzales ; Zermani, Olej, Heiss, Aznar et Weisskopf.

Le film de la partie

Un vent non négligeable souffle dans le sens de la longueur du terrain. Marseille gagne le toss e s'adosse au vent. La partie s'engage à 14 heures 45.

Après une série de touches favorables aux blancs, Vasconcellos intervient. Une charge irrégulière de Mercier sur Weiszkopf soulève les clameurs, et Gonzales, puis Ben Bouali brident les avants sétois. Un hors jeu de Heiss annihile une attaque des "blancs". Coup franc contre Laurent, gaspillé par hors jeu de Heiss. Un joli shot de Heiss trouve Llense à la parade et, en réplique, Vasconcellos dégage au pied devant Koranyi. Coup franc contre Brusseaux. Des hors jeux successifs arrêtent de beaux mouvements marseillais. Vasconcellos sauve au pied devant Brusseaux. Sète impose son jeu aérien, joue le forcing et obtient un corner, sur lequel Koranyi marque un but splendide d'un heading impressionnant. Il y a quatorze minutes de jeu.

Sète : 1 : OM : 0

Les Dauphins pratiquent un football remarquable, fait de passes précises et sèches qui déroutent les visiteurs. Raich passe Bruhin et place un shot puissant que Vasconcellos bloque. A la vingt deuxième minute, sur une attaque massive, les "blancs" obtiennent un penalty que Vasconcellos transforme

Marseille : 1 ; Sète : 1

Gonzalès coûte un coup franc ; Raich le donne et Vasconcellos met le corner. Brusseaux essaie sa chance de loin, sans résultat, et Bruhin dégage sur tir de Dard. Heiss donne à Zermani une occasion splendide, mais l'ailier manque son tir. Olej place, peu après, un shot puissant qu Llense détourne du bout des doigts. Coup franc contre Brusseaux. Vasconcellos dégage magistralement au poing devant Danzelle. Bruhin vaut ensuite un penalty à trente-cinquième minute pour charge sur Koranyi. Raich le shoote horriblement mal et le manque.

Zermani tarde à shooter et perd une occasion favorable. Les Marseillais dominent maintenant. Coup franc contre Balmanya ; Heiss reprend bien, mais Llense pare. Bastien sauve sur un départ de Koranyi, et c'est la fin d'une première mi-temps, rondement menée.

Le second half reprend à 15h51. Conchy dégagé devant Koranyi et Bruhin passe opportunément la balle à Vasconcellos "Hand" de Aznar ; Bastien dégage sur Zermani hors jeu. Raich reprend en force mais trop haut une tête de Ben Bouali ; le même joueur stoppe brillamment un départ de Dard, pis Olej, très actif, tente sa chance de loin en pure perte.

Heiss échoue de peu devant Llense ; en réplique, Conchy sauve son camp devant Brusseaux dont un second shot va dehors. Un shot puissant de Dard, en pleine course, heurte le poteau à l'extérieur ; Bruhin dégage. Koranyi, lancé par Brusseaux fonce et botte dehors. Le jeu s'anime, Sète accusant plus de volonté et de mordant. Dard trop belliqueux, est blessé dans un choc avec Gonzales. Il reprend sa place peu après. Brusseaux provoque Aznar, et donne un moment l'impression d'être égaré tant il veut se battre avec tout le monde, même avec ses camarades. M. Conrie sermonne Brusseaux et Aznar. Le jeu reprend, les équipes et le public faisant preuve de nervosité.

Belle attaque olympienne que Llense bride, Bastien doit aussitôt dégager devant Koranyi, Brusseaux permute avec Danzelle qui shoote à ras de terre ; Vasconcellos met en corner. Hors jeu de Heiss ; Aznar tire au but de trente mètres. M. Conrie accorde un penalty immérité sur charge de Koranyi contre Vasconcellos. Danzelle le botte, Vasconcellos le renvoit en corner. Koranyi essaie un "heading" que Danzelle prolonge dehors. Coup franc contre Mercier. Corner pour Sète ; Vasconcellos le détourne. Llense commet une grosse faute dans dommage pour son camp. Corner pour Marseille. La balle va à Bruhin qui botte trop haut. Corner pour Sète suivi d'un second que Bastien dégage.

Sète domine ; Marseille joue sur ses buts qu'il défend avec âpreté. Vasconcellos arrête un tir de Raich. Sète, qui veut gagner, donne à fond. Vasconcellos défend magnifiquement ses buts, et Heiss shoote en puissance au ras de la barre. Corner pour Sète que Brusseaux tire dehors. A la dernière minute, un tir de Raich va sur la barre et Vasconcellos met en corner. Tir de Brusseaux. Nouveau corner pour Sète que Brusseaux met dehors et c'est la fin.

Considérations

Nous comprenons mieux maintenant que Sète ait pu battre Sochaux au stade de la Forge. Les Dauphins affichent non seulement du cran en cette fin de saison, mais aussi une remarquable science du football qui leur permit de désorienter le plus souvent les joueurs de métier que sont cependant demis et arrières marseillais. Le jeu de demi-volée, d'obédience espagnole, que pratiquent les Sétois constitue leur arme a plus redoutable et nombre d'équipes doivent certainement se laisser manoeuvrer par cette débauche d'adresse et de vitesse. Malheureusement pour eux, les locaux ne purent pas supporter tout le long du match le train endiablé qu'ils s'étaient imposé et leur fléchissement permit aux phocéens d'amorcer leur redressement et de tenir tête avec brio aux assauts répétés autant qu'énergiques des pétulants Dauphins.

La sympathie que suscite le team héraultais serait toutefois bien plus grande si certains de ses composants apportaient moins de fanatisme dans leur tâche, fanatisme qui dégénère en pratique du jeu dur, quand il s'agit d'attaquer ou de se défendre. Et, a ce propos, nous avons pu constater que nos sentiments très favorables à quelques joueurs sétois n'étaient peut être pas bien fondés à moins que l'on soit contraint d'admettre que les Sétois ont deux aspects selon qu'ils opèrent sur leur terrain ou sur terrain adverse. La complaisante de M. Conrie à l'égard des fautes flagrantes et quelquefois dangereuses des locaux ne suffit pas à justifier cette propension trop marquée aujourd'hui à la recherche de l'homme au détriment de la balle. L'enjeu valait certainement que l'on apportât au combat plus de coeur que de coutume, mais enfin moins d'ardeur belliqueuse n'eût pas été déplacée.

Sète a dominé l'O.M. ; le nombre des corners à son avantage en est la preuve évidente, et cependant le match nul n'a rien d'injuste car il récompence la magnifique défensive des nôtres.

Llense dans les bois n'eût pas beaucoup de travail ; sa partie n'appelle pas de critique.

Mercier appuis nettement ses interventions ; c'est une conviction que l'on acquiert quand on le voit opérer de près. Ses interventions frisent le plus souvent l'irrégularité, mais on doit lui concéder un progrès sensible dans l'art de la place et de l'opportunité.

Franquès, plus sobre, moins dur, a su toujours placer adroitement Zermani hors-jeu et annihiler ainsi sans démonstration de puissance les quatre cinquièmes des attaques phocéennes.

Balmanya couvre énormément de terrain ; il affiche plus de disposition pour le jeu offensif, mais il a suffisamment de vitesse pour remonter l'adversaire.

Laurent nous avait habitué à mieux. Quant à Charles, sa tache fut grandement facilitée par le match en éclipses d'Aznar et de Weiszkopf.

Georges Dard s'est affiné à Sète. Toujours aussi volontaire, disputant toutes les balles, souvent par tous les moyens, il a réalisé une excellente partie faite de mouvements intelligents et subtils. Raich, excellent distributeur et joueur de volée très adroit, n'est certainement pas étranger à cette ascension rapide du jeune Marseillais.

Koranyi déchaîné a marqué un but transcendant d'un heading dont la force égalait celle d'un celle d'un tir fulgurant. Le sympathique avant centre a malheureusement donné dans le travers commun, mais, c'est égal, il reste un grand joueur.

 Brusseaux, irascible au plus haut degré, s'est signalé par autant de coups défendus que par des actions de football pur. Ce garçon a indubitablement les moyens de devenir un excellent inter, mais quel caractère, grands dieux ! Danzelle, enfin, manque d'étoffe ; le courage et la foi ne lui fond pas, en revanche, défaut.

Nous appréhendions vivement ce match O.M.-Sète. Ces craintes se sont en partie vérifiées puisque la rencontre a revêtu un caractère permanent de combat âpre et soutenu, mais l'audace des dirigeants olympiens a fait reculer le mauvais sort ; nos équipiers rentreront sains et saufs, seule leur mémoire conservera longtemps sans doute le souvenir de ce match homérique. Une part de hasard, considérable à mon sens, a évité aux Marseillais de cruelles meurtrissures ; félicitons nous-en avec empressement et satisfaction.

L'O.M. a mené son match à la manière d'une rencontre de Coupe, prenant ainsi un excellent galop pour dimanche. Le rendement de ma méthode peut paraître bien mièvre si l'on considère que Sète a concédé un but sur penalty, mais nous avons déjà expliqué la stérilité de l'attaque par la tactique sétoise de la mise hors jeu de l'adversaire. De ce fait, Zermani et Weiszkopf ne purent jamais placer un sprint ni démarrer convenablement.

Et pourtant le quintette était bien emmené par un Heiss en pleine forme, mais toujours les arrières sétois intervenaient à leur manière tantôt active - ô combien ! - tantôt passive comme nous le savons.

Si bien que demis et défenseurs soutinrent presque seuls le poids écrasant d'un match des plus pénibles. Ils le firent d'ailleurs avec maestria, soulevant l'admiration des véritables connaisseurs ; pour d'autres, les supporters bornés par leur parti pris, tout était marqué au coin de la veine dans leurs interventions ;

Vasconcellos, surtout, s'est vu attribuer par les Sétois la plus grande part de celle chance dont ils gratifient volontiers des adversaires qui savent se défendre et pourtant Vasconcellos a réalisé un match extrêmement brillant malgré la brutalité auxquelles il fut toujours exposé. Calme ou bondissant, sortant avec à-propos, se détendant comme un ressort, Vasconcellos a sauvé son équipe d'une défaite qui aurait pu être lourde sans ce brillant portier.

Bouali a, une fois de plus, fait la preuve qu'il était l'un des tout meilleur arrière de France. L'O.M. doit beaucoup aujourd'hui à sa maîtrise, à son allant, à son adresse et à ses nettes interventions.

Conchy ne l'a cédé en rien à son étincellent partenaire et son match sans défaillance n'a surpris que ceux qui ne connaissaient pas les qualités du sympathique arrière olympien.

Bruhin a débuté avec prudence et ménagement pour se donner en suite franchement au point même de coûter un penalty à son équipe. Mais il fut alors aussi bon attaquant que défenseur habite.

Bastien est le joueur le plus dynamique que possède l'O.M. S'il ne représente pas la France le 26 mai, contre l'Angleterre, il faudra vraiment que tout se ligue contre lui. En tout cas, son match d'aujourd'hui a été la démonstration nouvelle de sa très grande classe.

Gonzales avait affaire à forte partie ; son exhibition s'en est ressentie, il afficha des faiblesses répétées sur les passes croisées de Raich et de Dard. Sa fin de match impeccable a compensé cependant en partie ses défaillances.

Zermani et Weiszkopf n'ont pu donner leur pleine mesure sans quoi Sète eût éprouvé des difficultés plus nombreuses pour conserver le bénéfice d'un draw.

Olej, s'est acquitté de sa tâche ingrate avec un rare bonheur. Nullement impressionné par la fougue ou la rage de ses opposants, Olej a fait regretter aujourd'hui que Donnenfeld soit appelé à le suppléer dimanche à Paris.

Heiss, le meilleur du quintette ! Son exhibition fut un régal tant il a opéré avec aisance au milieu d'adversaires pressés de le déposséder de la balle. Oh oui pour sûr, Heiss est un grand joueur !

Aznar, enfin, a manifestement besoins de vacances prochaines. Ses réflexes sont émoussés. Sa combativité appartient en partie au passé, mais il est possible qu'Aznar se soi simplement réservé pour tâcher de gagner à Paris une nouvelle sélection.

Ce match disputé avec frénésie par les Sétois et avec plus de pondération par les nôtres, aura donc vu trois penalties. Deux étaient probablement justifiés, mais le troisième, acquis par Koranyi contre Vasconcellos - et qui aurait du se traduire par un coup franc contre le Sétois - constitue une monumentale erreur d'arbitrage. L'O.M. se doit d'y réfléchir.

JEAN JAVELOT

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Résumé du Petit Marseillais

du 02 mai 1938

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Anecdotes concernant les trois penalties

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>> Penalty de Vasconcellos

Aznar et Weiskopf ne voulaient pas le tirer alors Bruhin appelle El Jaguar qui en s'avançant se livra à une véritable mise en scène :

"- Toi René, petit gardien dé but, tout pétit, toi en équipe de France, parce que Vasconcellito pas Français. Moi, te marquer penalty là... là... là...", en lui montrant le coin à ras de terre ou il allait tirait.

Llense pensant que Vasconcellos se moquait de lui, plongea à l'opposé et El Jaguare envoya la balle exactement ou il avait dis, permettant à l'OM d'égaliser

En retournant dans ses buts et en riant de toutes ces dents, il croisa Bruhin et lui dit : " -Toi content Napoléon." (surnom de Bruhin à cause de sa mèche de cheveu)N

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>> Penalty de Balmanya

Alors que le Sétois Balmanya s'apprêtait à tirer le penalty suite à une faute de Bruhin sur Koranyi, El Jaguar entama sa phase de déstabilisation.

"-Balmanya ... ah... ah... toi Espagnol, toi en France pendant que amis se battent là-bas au pays. Toi devrais avoir honte. Toi vas manquer penalty..."

Et effectivement le tir du demi-centre Sétois passa au-dessus.

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>> Penalty de Danzelle

Cette fois ci c'est Danzelle qui est désigné pour tirer ce penalty alors que c'est Koranyi qui avait chargé Vasconcellos.

Voyant ce jeune joueur (18ans) se présentait devant lui, il comprit tout le poids qu'il pesait sur ces épaules et lui dit

"-Toi Danzelle, toi pétit jugador, toi voudrais marquer oun but au grand Vasconcellos !... Impossible. Toi vas manquer le shoot"

Et effectivement Danzelle envoya directement le ballon dans les bras de El Jaquar

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Résumé du Meridional

du 02 mai 1938

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Résumé de L'Eclair

du 02 mai 1938

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