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Résumé Le Provencal

du 26 février 1977

 

NOUVELLE DEROUTE A FURIANI

 La défense marseillaise balayée par Bastia (0-4)

(D'un de nos envoyés spéciaux Jean FERRARA)

BASTIA - Personne n'attendait évidemment une victoire olympienne à Furiani. Dans le contexte actuel et que tous les Marseillais ne connaissent que trop, un match nul eut été un véritable exploit. Mais il est évident que ce 4 à 0 encaissé hier soir à Bastia va encore faire l'effet d'une douche glacée sur les supporters, sur les joueurs et bien entendu leurs dirigeants qui, sur ce seul le match, n'ont pu guère entrevoir de solution à leurs problèmes.

La seule conclusion que l'on puisse apporter et qu'il est décidément bien difficile de sortir du tunnel quand on s'y est résolument engagé comme l'a fait l'O.M. ces derniers temps.

LES COUPS DE PIED DE DZAJIC

La première mi-temps, comme d'ailleurs toute la rencontre, fut celle des paradoxes. D'un côté, un O.M. qui joue le jeu et même le joue bien, pendant les premières minutes ; de l'autre, Bastia qui, à part quelques velléités offensives, se montre d'une prudence pour le moins surprenant quand on connaît la légendaire furia de l'équipe insulaire sur sa pelouse mascotte de Furiani.

Nous en étions alors avec nos confrères marseillais à découvrir, ou plutôt à redécouvrir l'espace de quelques instants, une formation olympienne affichant des ambitions sur terrain adverse, ce qui ne s'était pas vu depuis fort longtemps, il faut bien ajouter. Quant aux Bastiais, ils nous semblaient pendant le même temps encore traumatisés par leur élimination en Coupe de France. L'impression était-elle bonne ou mauvaises ? On ne sait !

Toujours est-il que, se méfiant de la réaction marseillaise et des contre amorcés par leur capitaine Bereta, les Corses laissaient pas mal d'initiative à leurs adversaires, qui en profitaient pour placer les premières banderilles. Et encore n'est-ce pas tout à fait le mot exact car, après deux ou trois tentatives bien amorcées, Bereta eut le but au bout du pied dès la 7e minute.

C'est dire si l'O.M. n'avait pas mal débuté du tout cette rencontre.

Malheureusement, pour le capitaine et pour toute son équipe, cette sorte d'illusion ne dura qu'une quinzaine de minutes ; sur le tir de Bereta, Petrovic eurent un excellent réflexe qui lui permit de repousser le ballon du bout de son soulier.

TRÉSOR OU ES-TU ?

Pourtant vous connaissez le résultat à la fin de cette première mi-temps : Bastia 2 - O.M. 0. Alors, qu'avait-il bien pu se passer pour que cet O.M. sinon séduisant, du moins encourageant avec les moyens qui sont les siens actuellement, ait pu se laisser distancer de la sorte ?

Eh bien, c'est au moins pour deux raisons essentielles : la première est que Dzajic a décidément un secret bien à lui pour tirer les coups de pied arrêtés. La deuxième est que la défense marseillaise ne s'était certes pas méfiée du spécialiste yougoslave, mais aussi et surtout, cette même défense avait fait preuve, à chaque fois où chaque but, d'un placement catastrophique.

Pour la première fois peut-être depuis sa blessure, nous avons pu mesurer à quel point l'absence de Trésor a été pour cette équipe un handicap insurmontable. Avec lui, nous sommes prêts à affirmer que l'O.M. n'aurait pas enregistré hier soir une aussi sévère défaite.

C'est dommage ! Les olympiens, nous l'avons dit, avaient apporté la preuve pendant le premier quart d'heure qu'ils savent encore jouer au football.

Mais ils ont encaissé leurs deux premiers buts sur coups de pied arrêtés, ceux de Dzajic bien entendu.

Mais les deux autres, la tête de Papi, puis celle de Félix étaient au point de chute et Bastia qui jusqu'alors était resté sur la réserve, pouvait enfin se livrer.

La suite des opérations ne fut en fait qu'une simple formalité.

Cependant si les Corses dominèrent la deuxième mi-temps, encore plus qu'ils ne l'avaient fait pour la première, ils aggravèrent la marque dans les mêmes conditions ou presque. Corner de Dzajic (encore). Reprise de Zimako et enfin tir tendu d'Orlanducci dernier but qui fut le seul, en faisant les comptes, à être véritablement marqué en mouvement.

Il est certain comme nous le signalons au début de cet article, que cette sévère défaite ne va rien faire pour ramener la sérénité dans le camp marseillais.

Si nous pouvons terminer sur une note la moins pessimiste possible, nous dirons que l'O.M. a souvent contenu une bonne équipe bastiaise sur une grande partie du terrain.

La meilleure des preuves et que ces olympiens se sont créé, hier soir, un nombre d'occasions considérable, ce qui est tout de même assez rare quand on joue à l'extérieur.

C'est évidemment une bien mince consolation de s'appuyer sur cet argument, mais c'est un fait leur défense qui n'a pas tenu.

Il a manqué aussi à cette formation un vrai patron et surtout un réalisateur qui aurait pu donner à cet échec une allure moins accablante.

Il n'empêche que pour retrouver une équipe digne de Marseille, il faudra encore faire preuve de beaucoup de patience.

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"Sacré Dzajic"

(D'un de nos envoyés spéciaux André de ROCCA)

Cette défaite de l'O.M. à Bastia entre dans le cours normal des choses. Sur son tableau de marque, Jules Zvunka, qui est un homme prudent et avisé, avait inscrit en face du nom Bastia, le chiffre 0.

Autant dire que dans ces conditions, essayer de trouver un homme du match dans le rang olympien relève un tantinet de l'exploit.

Nous avons pourtant trouvé un ; il s'agit de René Charrier.

N'allez pas croire par-là que nous tentons de faire de l'humour noir, mais si nous accordons aujourd'hui une large place dans ces colonnes au gardien de but de l'Olympique de Marseille, c'est qu'il fut aux premières loges pour admirer l'efficacité et l'élégance de ce diable d'homme qui se trouve être le Yougoslave de Bastia : Dragan Dzajic.

"C'est un sacré joueur, nous dit Charrier, en grimaçant (il a pris un coup très douloureux à un endroit particulièrement sensible). Je dois avouer que ses coups de pieds arrêtés sont un modèle du genre. On ne sait jamais où il va les placer. Un coup il expédie le ballon au premier poteau, un coup au deuxième poteau, un coup au milieu, et toujours avec une trajectoire pour le moins inattendue.

"Pour un gardien de but, c'est un véritable calvaire, croyez-moi".

Et Charrier de continuer :

"Je ne voudrais pas paraître prétentieux mais j'avais abordé ce match confiant.

"Les premières minutes de la rencontre me donnèrent raison puisque j'eus l'occasion, à deux reprises, de stopper des essais de Zimako. Quelque temps après, ce fut le commencement de la fin, dans des conditions qui demandent quelques explications.

"Le premier but, au terme d'un coup franc botté par Dzajic, au premier poteau, n'a pas été marqué par Papi comme la plupart des gens l'ont cru mais par Martinez qui, bousculé, a catapulté du dos la balle au fond des filets.

"Sur le deuxième, et là encore peu de gens s'en sont rendus compte, j'ai reçu un coup de crampons ou vous savez alors même que je reculais pour m'apprêter à sauter.

"Quant au troisième, sur une nouvelle balle diaboliquement tirée de Dzajic, j'ai boxé la balle des deux poings ; que voulez-vous que je fasse d'autres ?

"Il a fallu qu'elle aille tomber dans les pieds de Zimako.

"Rien à dire sur le quatrième, la reprise d'Orlanducci était très belle et admirablement placée".

Enfin, René Charrier expliquait pourquoi M. Hélies avait refusé le but marqué sur un coup franc par l'arrière gauche bastiais Burkhardt. Dans les tribunes, nombreux furent ceux qui se gaussèrent du gardient marseillais, estimant qu'il avait fait, en l'occurrence, une monumentale erreur. Du tout. Écoutons plutôt l'explication de René :

"J'avais vu que M. Hélies avait accordé à nos adversaires un coup franc indirect. Le ballon frappé par Burkhardt, une fois encore aidé par le vent, prenez une trajectoire vicieuse. Je risquais, en intervenant, de renvoyer cette balle "chaude" dans les pieds d'un l'attaquant insulaire, à l'affût. À la fin, mettant rendu compte qu'il n'y avait aucun attaquant Corse autour de moi, j'ai finalement laissé filer le ballon dans les filets. C'est alors que j'ai eu une frayeur, car M. Hélies, dans un premier temps, montra du doigt le centre du terrain. Heureusement il m'a vu gesticuler et il a ensuite annulé ce point". On le voit, en quelques phrases, René Charrier nous a conté les mésaventures d'un gardien de but au stade de Furiani et nous a répété, avant de quitter : "Mais ce Dzajic, quel sacré joueur !" À Bastia, ou le Yougoslave est devenu l'idole des foules, personne n'en doute.

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Les réponses aux questions que vous vous posez

Cette défaite marseillaise est-elle dramatique ?

Comme nous le signalons par ailleurs, l'équipe marseillaise n'espérait guère ramener des points de son déplacement en Corse. En fait, cette rencontre était bien plus importante pour Bastia qui joue, vous le savez, une première place, que pour l'O.M. qui doit surtout s'attacher désormais à gagner au stade vélodrome. C'est surtout l'ampleur de cet échec qui va prendre à Marseille une résonance plutôt pessimiste dans la situation où se débat à l'heure actuelle le club olympien. Alors, dramatique non, mais attention, il faudra gagner sans coup férir contre Sochaux, lors de la prochaine journée de championnat. Car dans le cas contraire, il faudrait bien entendu réviser le jugement.

Aucun représentant de la Direction hier soir à Bastia ?

Nous avons en effet été surpris de ne trouver ni M. Meric ni M. d'Agostino, hier soir dans les tribunes officielles de Furiani ; c'était M. Martinelli qui était l'accompagnateur officiel de l'équipe.

Bastia peut-il être un Champion de France ?

Ce ne serait pas à exclure. Les Corses qui sont véritablement intraitables sur leur terrain ont leur mot à dire dans la course au titre, ils pourraient menacer sérieusement les Nantais, à condition toutefois de se montrer un peu plus réaliste à l'extérieur. À vrai dire, qui possède la meilleure attaque du championnat sont en très nets progrès dans ce domaine.

N'ont-ils pas fait coup sur coup souffrir Nantes au stade Marcel Saupin et Saint-Étienne à Geoffroy Guichard avant d'obtenir un point à Metz, au stade Saint-Symphorien où, on le sait, il est très difficile d'obtenir le nul ? Ainsi donc, il faudra compter sur cette fin de championnat, avec les hommes de Pierre Cahuzac qui forme une équipe de gagneurs et qui, en draguant Dzajic, ont un joueur de classe vraiment exceptionnelle.

Charrier est-il condamnable ?

Contrairement à ce qui pourrait laisser croire le score, Charrier nous a fait meilleure impression hier soir que voici huit jours face à l'équipe de Troyes. Certes, il y a concédé quatre buts, mais en pareilles circonstances (et même sans le vent, qui, hier soir, a terriblement gêné le gardien de but Pantelic, le goal de Paris-Saint-Germain n'avait pas fait mieux, contrairement à ce qui était devenu pour lui une très désagréable habitude). Charrier a réussi quelques arrêts très nets sur des tirs pourtant appuyer notamment de Zimako et de Papi.

Va-t-on insister dans les matches qui viennent, au grand retour de René Charrier ? Ce n'est pas impossible du tout. On aura l'occasion de juger sur pièces prochainement contre Sochaux

J.F. et A. de R.

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Jules Zvunka : "Le chemin sera long"

Une fois de plus (on commence hélas sans en avoir l'habitude), les vestiaires marseillais étaient silencieux, à l'issue du match qui venait de voir la lourde défaite olympienne face à Bastia.

Jules Zvunka tournait en rond, comme un ours en cage et il fut le premier à rompre le silence.

"C'est un curieux match que nous avons vécu. Nous n'avons jamais été malmenés. Nous n'avons jamais été bousculés. Nous avons eu des ballons aussi souvent que nos adversaires et à la sortie nous partons avec quatre buts dont nos valises. Décidément, les coups francs et les corners sont en passe de devenir une spécialité bastiaise. Levez les coups de pied arrêtés et vous verrez que, tout compte fait, les Corses n'ont guère eu plus d'occasions que nous. Ceci dit, il faut bien avouer que leur victoire ne souffre d'aucune contestation. Il n'était pas prévu que nous repartions de Furiani avec les deux points de la victoire. Une seule chose est évidente : il nous reste beaucoup de travail à faire".

Victor Zvunka, tout en se rhabillant, expliquait :

"Dès les premières minutes du match, Petrovic a réussi un exploit sur un tir de Bereta.

"Quelques secondes plus tard, sur le contre, c'est Martinez qui marquait contre son propre camp. À partir de là, et comme cela s'est déjà produit plusieurs fois cette saison, nous avons complètement craqué. Voilà qui devient une fâcheuse habitude".

François Bracci qui, on le sait, n'est pas avare d'explications, donnait son sentiment :

"Je suis déçu et je vais vous dire pourquoi. Durant toute la semaine, à l'entraînement, nous avons fait preuve de beaucoup de sérieux et de beaucoup d'enthousiasme. Allez savoir pourquoi sur le terrain nous n'arrivons pas à exprimer cela.

"Désormais, il va une fois encore nous falloir travailler d'arrache-pied et surtout éviter de faire le moindre faux pas à domicile.

"Ceci dit, je dois avouer que l'équipe bastiaise m'a fait excellente impression et je souhaite qu'elle termine le championnat dans les trois premiers".

Marcel Prévost nous donnait, lui, des nouvelles des éclopés marseillais.

"Georges (lisez Bereta) souffre d'une douleur à la cuisse et il a préféré sortir en seconde mi-temps. Quant à Martinez, il nous semble plus sérieusement blessé. Il souffre, lui, d'une douleur à un ligament au niveau de la rotule. Dès notre arrivée à Marseille, il faudra qu'il passe une radio".

Devant la porte des vestiaires, à notre sortie, nous avons trouvé MM. Gallian, Bicais et Roubaud. Inutile de leur poser des questions pour savoir quels étaient leurs sentiments à l'issue de ce match. Leur expression, lorsqu'ils nous virent, fut assez significative...

Nous laisserons la conclusion (vous remarquerez que les Phocéens n'étaient, hier soir, guère bavard, mais on les comprend) à Raoul Noguès. Le Franco-Argentin, qui a réalisé hier soir un bon match (il fut en tout cas le meilleur olympien), n'avait pas le sourire.

"Certes, je crois que, pour moi, la forme revient ; mais l'important n'est pas que je sois en forme, mais que l'équipe gagne. Peut-être que dans les matches à venir, avec le calendrier qui nous attend, nous arriverons enfin à aligner deux ou trois succès consécutifs. C'est la condition sine qua non pour que nous arrivions à nous en sortir..."

A. de R.

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CAHUZAC : "Un match facile"

Ce n'était pas une joie exhubérante dans les vestiaires corses ou chacun était bien sûr heureux de l'avoir emporté, mais où chacun aussi estimait avoir simplement fait son travail.

L'entraîneur Pierre Cahuzac, qui on le sait n'est pas bavard, devait se borner à déclarer :

"Notre victoire ne souffre d'aucune contestation, c'est vrai, mais à mon sens le match fut loin d'être enthousiasmant. Ce fut en vérité un match assez facile, je dois le dire".

Le plus heureux été sans doute Orlanducci qui avait étrenné ses galons de capitaine en marquant un but. "Ce soir, disait-il, je suis aux anges. En effet, que pourrais-je demander de mieux. J'ai marqué un but, mon équipe s'est imposée facilement, nous sommes toujours dans la course au titre, que demander de plus".

Enfin Claude Papi, qui avait été victime d'un coup de coude à l'oeil de la part de Raoul Noguès concluait : "Cette équipe marseillaise ne nous a jamais fait souffrir. Mais j'espère pour elle qu'elle sera réagir au cours des prochains matches à venir. Il serait vraiment dommage qu'un club qui représente autant dans le football français soit condamné à jouer la saison prochaine en deuxième division. C'est une éventualité que je veux exclure".

A. de R.

 

 

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