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Résumé Le Provencal

du 10 novembre 1974

 

UN BONUS INESPERE DEVANT BORDEAUX

Grâce aux coups de pieds arrêtés de Paulo CEZAR

Un bonus qui vient de loin et qui ne signifie nullement bon match.

Il fut acquis à la suite de trois coups de pied arrêtés, et il faut bien dire que la jeunesse et la naïveté du gardien girondin Blusson ne furent pas étrangère à cette étonnante réussite olympienne.

Car tout le long de la rencontre, les deux équipes ne gâtèrent par le public.

Tant sur le plan tactique que sur celui de la technique, on put se demander le plus souvent quel jeu pratiquaient les deux équipes.

Les Girondins furent les meilleurs en première mi-temps, mais en seconde ils manquèrent d'ambition ou de condition physique.

Quant à l'O.M., pratiquement privé de ses deux Brésiliens dans le jeu ouvert, et se chercha tout au long des 90 minutes.

Paulo Cezar fut finalement le héros de cette rencontre. L'efficacité en football compte avant tout. Cependant, on peut dire que s'il était resté assis sur un fauteuil à côté de son entraîneur et ne s'était levé que pour tirer les coups francs, le résultat et le cours de la partie eussent été les mêmes.

Cette remarque, que tout le monde aura pu faire, devrait constituer pour l'équipe de l'O.M. une leçon de modestie.

LE TEMPS DES BARBUS

La première mi-temps avait été celle de l'ennui et des barbus.

L'O.M. à l'image de ces deux Brésiliens paraissait avoir été piqué par une quelconque mouche tsé-tsé, et à chacune des actions girondines, il y avait un barbu dans le coup : Fraunié ou Largouet, et en fin de mi-temps même Arribas.

Mais si l'un de nos voisins finit par crier : "La barbe !", c'était pour stigmatiser la petite qualité du jeu et le manque de passion du débat.

Tant et si bien que les meilleurs joueurs de cette première mi-temps avaient été Tokoto (numéro un), Giresse, Jean Galice et Charrier. Il ne restait plus qu'à attendre la suite, car en football, l'important est toujours la fin.

PAULO CEZAR SE RÉVEILLA

TROP TÔT

La deuxième mi-temps fut marquée par une assez nette domination de l'O.M., Charrier n'ayant été sérieusement menacé qu'à une ou deux reprises.

Mais les olympiens continuèrent à jouer dans le désordre, et il faut trois incidents de jeu pour qu'ils réussissent à gagner la rencontre d'abord, et à obtenir finalement ce fameux bonus qui enchanta tant les spectateurs.

Le premier, tout en début de mi-temps, fut obtenu sur coup franc, le coup franc était d'ailleurs discutable, le mur bordelais était mal fait, et le gardien Blum commit l'erreur de lâcher la balle.

La partie s'endormit ensuite. Parfois le jeu ressemblait à celui qui se fait dans une cour d'école, les joueurs étant les uns sur les autres au milieu du terrain. Un deuxième coup franc, alors que l'on commençait à se demander si les Girondins n'allaient pas pouvoir égaliser. Paulo Cézar le tira, et par une sorte de miracle, le ballon se trouva au fond de la cage girondine.

Et c'est tout à fait en fin de rencontre que l'O.M., obtenant un penalty parfaitement mérité, se créa sa dernière occasion du but. Paulo Cézar tira ce penalty et, suivant son habitude, pris le gardien de Bordeaux absolument à contre pied.

C'était un peu près tout ce que l'on avait vu de bon en 90 minutes.

NE SOYONS PAS TROP

EUPHORIQUES

Alors que les deux équipes regagnaient les vestiaires, une partie du public, laissa éclater sa joie.

Il est bien évident que cette victoire nous fait, à nous aussi le plus grand plaisir.

Mais de là à dire que l'O.M. possède désormais une équipe irrésistible, capable de redevenir championne de France, il y a un pas que nous ne franchirons pas.

Il y a dans ce succès une telle part de réussite, et aussi une telle part d'arbitrage, que nous refusons à considérer que l'O.M. a désormais trouvé la bonne carburation.

Sur l'ensemble de la partie, les olympiens ne réussirent que très rarement à construire de véritables offensives.

Quant à Jairzinho il commence maintenant à inquiéter vraiment.

Hier soir, il n'a pas du tout produit l'impression d'être l'athlète en forme.

Il n'avait pas ces jaillissements que le monde entier du football connaît, et ce qui fit le mieux fut de tomber à chaque charge. Les multiples coups francs sifflaient pour l'O.M. grâce à Jairzinho commencent à devenir un gag. La classe de ce joueur ne nous échappe pas. Mais il lui manque encore une bonne part d'entraînement.

Le grand Jairzinho, celui des deux Coupes du monde, nous ne l'avons pas encore revu.

Espérons que ce sera pour le prochain match de l'O.M. ! Nantes.

Maurice FABREGUETTES

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Cezar toi sans qui

les choses ne seraient

que ce qu'elles sont

Si les trois consenties en matière d'économie régissaient le football professionnel comme celui du commerce, on pourrait crainte l'O.M. soit en faillite une année sur deux.

Je veux dire par-là que l'image de marque et la qualité du produit qui nous est offert serait quelquefois, et souvent peut-être, de bien piètre attirance pour ne pas dire impropre à la consommation.

En revanche, nous aurions aussi en certaine occasion à nous délecter des douceurs de la friandise que peut aussi nous proposer ce même O.M.

En clair, on ne s'étonnera jamais assez de cette équipe qui, à l'image du club et à travers les générations, a su enchanter, puis décevoir, fanatiser puis écoeurer le peuple fou qui l'entoure.

À preuve les hommes actuels, ceux de Jules Zvunka.

Un jour à Nice, ils comblent de présents leurs supporters fidèles, les rassurent à Bastia où il fait pourtant chaud, puis un peu plus tard barbotent, font se laminer les mêmes fidèles devant Troyes, donc ils ne peuvent enfourcher le petit cheval, et en fin de compte se dévirilisent, s'effacent jusqu'à être totalement gommés à Nîmes.

Et, sans pour cela perdre un seul des dizaines de milliers de croyants qui, par vice et amour, se mettent en prière chaque fois qu'ils apparaissent sur le rectangle vert.

L'O.M. c'est le cas, le seul cas d'inconscience collective et de fidélité inconditionnelle.

Son équipe peut tout donner et tout reprendre, tromper et bafouer sans vergogne et sans jamais provoquer la rupture définitive, tout au plus une brouille qui ne dure pas.

Il suffit pour cela qu'une seule sérénade au balcon d'un seul match comme celui d'hier soir tout pour que les coeurs explosent et se déversent en flot de bonheur à n'en plus finir.

L'O.M. c'est un zoo curieux avec des animaux de sang comme la plupart, et de race pour quelques-uns. C'est à la fois un composé hétéroclite et invertébré qui, en tout état de cause, détruit les données, sape la logistique et confond les estimations les mieux établis.

J'imagine qu'à la mi-temps de ce match contre Bordeaux, qui était frelaté pour certains rasades tout un stade concluait à la supercherie.

Et, pour tout dire, trouvait cette équipe marseillaise si médiocre qu'il devenait insolent de la savoir espérer les grands rôles du championnat.

Mais il n'y a Paulo Cezar dans cette équipe. C'est-à-dire quelque chose de plus que la classe. Le talent au service de la clairvoyance la plus profonde dans les ténèbres.

Et c'est encore lui qui a tout fait ou presque.

Trois buts signés de son coup de patte. Car il est temps que les chaleurs du stade fassent mûrir Filho Jairzinho, il est temps de vérifier ce que Bonnel, Gress et compagnie, cette ligne d'or dite du milieu de terrain qui fit la joie de Skoblar et Magnusson, n'a jamais été remplacé.

Il est temps que tous nos musiciens en maillot blanc apprennent et suivre la partition de leur répertoire ou, si vous préférez, l'arbre ne doit pas cacher la forêt.

Sous peine de s'y perdre.

Lucien d'APO

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Ils disent

Méric : "L'équipe a su réagir à temps"

Beaucoup de monde comme toujours dans le vestiaire olympien après cette rencontre fertile en émotions.

Les joueurs et les dirigeants étaient d'autant plus satisfaits que longtemps ce match avait été indécis.

M. Meric, le premier, était encore sous le coup de l'émotion quand nous lui avons demandé son opinion.

"Je suis sans voix mais enfin j'ai le sourire. L'équipe a pris le bonus. Je ne pense pas que nous puissions en espérer davantage. Bordeaux, une fois de plus, ne s'est pas montré un adversaire très fair-play, mais la défaite des visiteurs montre pour une fois que le jeu dur n'est pas toujours payant".

"J'ai renoncé pour ma part à compter le nombre de coups franc dont ont bénéficié les deux Brésiliens comme d'ailleurs la plupart de leurs camarades. Cependant, nous avons vaincu et je veux bien, pour ce soir, oublier tous ces petits incidents".

Voilà, maintenant l'O.M. à deux points du premier.

"Oui, nous sommes dans une excellente position, nous a répondu M. Meric. Au début de la saison, j'avais annoncé que l'O.M. terminerait au moins dans les cinq premiers. Cette victoire me permet, ce soir, d'espérer un meilleur résultat. Et pourquoi pas après-tout le titre de champion de France. Je sais bien, le public n'a pas assisté à une très bonne première mi-temps. Mais je dois signaler que l'équipe a su réagir à temps. En rentrant sur le terrain au début de la deuxième mi-temps, tous les joueurs étaient animés d'une meilleure volonté, décidés à forcer la victoire. Ils sont parvenus et ma foi, je ne vois pas pourquoi je ne les féliciterai point".

Paulo Cezar était allongé sur un relaxe lorsque nous l'avons retrouvé pour recueillir ses impressions.

- ALORS PAULO VOS COUPS DE PIEDS UNE FOIS DE PLUS ON FAIT MERVEILLE ?

- "Oui, j'ai eu de la réussite dans mes tentatives, mais il ne faut pas mettre cette victoire sur le compte d'un seul joueur. C'est toute l'équipe qui s'est bien battue pour forcer le résultat et obtenir un bonus qui nous place désormais à portée du leader de la Division Nationale. J'espère maintenant que nous saurons poursuivre sur notre lancée".

JAIRZINHO lui se plaignait d'avoir été quelque peu bousculé par ses gardes du corps Bordelais :

"Même lorsque je n'avais pas le ballon, tous mes gardes du corps m'empêchaient par n'importe quel moyen de pouvoir m'exprimer. Mais qu'importe, notre formation a eu finalement le dernier mot.

Jules Zvunka fumait une cigarette pendant que tous ses joueurs dégustaient le champagne Canard Duchêne de la victoire.

"En première mi-temps nous dit-il, j'ai eu l'impression comme d'ailleurs la majorité des spectateurs, que Bordeaux parvenait peu à peu à prendre le match en main. Mais le premier but de Noguès est parvenu à libérer toute équipe. Et en retournant pour jouer la deuxième mi-temps on a bien vu que ce nouvel allant devait être bénéfique à nos couleurs. On dira peut-être que la manière n'a pas été excellente, surtout pour une formation qui jouait devant son public. Mais n'oublions pas que Bordeaux et un adversaire dangereux et sincèrement, je ne m'attendais guère à obtenir 3 points devant les Girondins. Alors, je consulte le classement et je m'aperçois que l'O.M. a réalisé, ce soir, une très bonne opération. Pour une fois on fermera un peu les yeux sur la manière. Dans un Championnat de France, vous le savez, seul le résultat compte".

Alain Bouze qui faisait ses grands débuts dans l'équipe professionnelle était lui aussi très entouré par les journalistes.

"Pendant les 45 premières minutes, nous confiait-t-il, je dois avouer que j'ai quelque peu souffert. J'étais, en effet, surpris par leur rythme qui est bien plus rapide qu'en 3ème Division. Mais tous mes équipiers de la défense m'ont tour à tour encouragé et au fil des minutes, j'ai pu prendre confiance".

Signalons à ce sujet que tous les responsables olympiens se sont montrés très satisfaits des débuts du jeune joueur, et Jules Zvunka en premier lieu n'a pas tari d'éloges sur Alphonse Troisi qui lui débutait en 3ème Division. Laissons la conclusion au capitaine Marius trésor : "Je suis bien sur satisfait du résultat mais je pense que l'O.M. n'a pas abordé la rencontre comme elle aurait du le faire. Si nous avions affiché la même détermination en première mi-temps, nous n'aurions certainement pas connu de problèmes. Je suppose que Bordeaux n'était pas venu pour gagner mais visiblement recherché le match nul. Vous avez vu, lorsque nous avons appuyé sur l'accélérateur en deuxième mi-temps, nous avons réussi à les déborder. Enfin le principe désormais, est que notre équipe se situe dans le haut du tableau".

Jean FERRARA

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COUECOU : " En football il n'y a pas d'injustice"

Des visages défaits évidemment, nous attendaient dans les vestiaires bordelais. André Menault, l'entraîneur n'était pas spécialement satisfait de l'arbitrage de M. Verbecke.

"J'aimerais bien que l'on m'explique, commentait-il, pourquoi l'attitude d'un arbitre peut ainsi changer du tout au tout d'une mi-temps à l'autre. Il avait parfaitement officié durant 45 minutes. Pourquoi s'est-il mis à nous défavoriser ainsi ?

On travaillait comme des dingues à l'entraînement, et voilà qu'un seul homme vient tout ficher par terre. Et, en plus, nous récoltons deux avertissements.

"Cela dit, nos erreurs de défense demeurent bel et bien réelles. Nous avons encaissé trois buts sur autant de coups de pied arrêtés.

"Et le résultat est dur, très dur, pour des gars qui n'ont nullement le sentiment d'avoir été surclassé".

Nous avions perdu chez nous, contre Paris, et il n'y avait rien à redire, mais ce soir..."

Didier Couecou n'était pas du même avis que son entraîneur :

"En football, nous disait-il, il n'y a pas d'injustice. Nous avons perdu avant tout par notre propre faute, en n'étant pas assez concentré sur les coups de pied arrêtés. Le football est ainsi : on gagne des matches que l'on devrait perdre, et inversement. Demain, cela jouera en notre faveur.

"Nous étions pourtant venus ici pour gagner, mais peut-être n'avons-nous pas encore la force morale suffisante pour tenir le coup devant de grandes équipes".

Enfin, Jean-Pierre Tokoto pestait lui aussi contre l'arbitrage :

"A l'extérieur, il devient impossible de jouer. On ne peut plus toucher un adversaire. Il est dommage que nous ayons flanché ainsi en deuxième mi-temps. Mais je crois que la grande première mi-temps de Charrier a été aussi pour beaucoup dans le résultat final".

Alain PECHERAL

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Le fait du match

Gardons les pieds sur terre !

Le football, on le sait, est une chose bien curieuse. Hier soir, nous en avons eu une nouvelle fois la preuve. Jusqu'à ce jour, l'O.M. avait raté quatre ou cinq bonus cent fois à sa portée. Hier il en a gagné un absolument inespéré. À la mi-temps, personne n'aurait parié un centime sur les chances des Olympiens de remporter une victoire à trois points. Dame, on se souvenait encore de Troyes. Et puis, les premières quarante-cinq minutes avaient été d'une telle médiocrité, qu'on pouvait bien se demander par quel miracle les attaquants phocéens pourraient faire mouche à trois reprises.

Le miracle eut lieu. Il s'appelle Paulo Cezar. Ne nous faites pas écrire ce que nous n'avons pas écrit. Le Brésilien n'a pas fait un grand match, loin s'en faut. Et s'est contenté, si l'on peut dire, de faire la décision. Grâce à trois coups de pied arrêtés.

Aujourd'hui l'O.M. totalise vingt points et talonne les leaders au classement. Il faut s'en féliciter. Mais, de grâce, il serait malvenu de se plaindre que la mariée soit trop belle, il ne faut surtout pas sombrer dans un optimisme béat. Après avoir félicité ses hommes, Jules Zvunka sera bien inspiré en leur montrant au magnétoscope les quarante-cinq premières minutes du match. Elles furent d'une rare indigence. Et la bordée de sifflets qui accompagna les Marseillais aux vestiaires n'était pas volée. À croire même que Bordeaux et Olympiens s'étaient entendus pour appliquer, avec vingt-quatre heures d'avance, les nouvelles fois concernant la limitation de vitesse.

Ce fut du bien pauvre football. Coups défendus, passes à l'adversaire, tirs manqués, le tout sur un rythme de sénateur. En deux mots, un mauvais match amical. Et puis ce furent les trois buts. La sécheresse du tir de Paulo ne doit cependant pas être l'arbre qui cache la forêt. Il faudra encore beaucoup travailler pour que l'O.M. puissent vraiment jouer les premiers rôles. Faute de quoi, dans le camp olympien, on risquerait de déchanter bien vite.

Et ce pas plus tard qu'au terme du prochain match qui doit se jouer au stade vélodrome : St-Étienne sera le visiteur. Et les "verts", on le sait, n'ont pas l'habitude de faire des cadeaux, boulevard Michelet, pas plus qu'ailleurs. Demandez aux Bastiais.

André de ROCCA

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