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Résumé Le Provencal

du 19 octobre 1974

 

Le roi Paulo a survolé le match

Jairzinho : une timide première.

Un match qui, après avoir marché au pas en première mi-temps, s'emballa en seconde au point de justifier son qualificatif de gala et d'enchanter les spectateurs.

Le roi Paulo, dans ses meilleures oeuvres, survolant la rencontre. Le bonus pour l'O.M. Une réplique généreuse et spectaculaire de Monaco, avec un remarquable Dalger.

Jairzinho, encore en rodage, à revoir et à rejuger.

Voilà ce qui ressort en première expression de cette O.M.-Monaco disputé devant une foule énorme et dans une ambiance qui, si elle fut très chaude, ne dépassa jamais les limites sportives.

On peut penser que le tandem Paulo Cezar - Jairzinho ne tardera pas à faire des ravages dans notre championnat. Ce n'est qu'une première impression après cette seule rencontre, mais nous serions fort surpris si elle ne se réalisait pas.

Hier soir, Paulo Cezar a montré à la grande foule marseillaise ce qu'était le véritable jeu brésilien, fait de finesse, d'intelligence, de virtuosité et d'inspiration.

Le jour où Jairzinho pourra suivre le mouvement, ce qui ne devrait pas tarder, il faut s'attendre à revoir l'O.M. remonter rapidement au classement.

Toutefois, attendons un peu avant de conclure, le championnat nous propose d'autres rendez-vous très importants, ne serait-ce que le prochain match à disputer à Lens.

PAULO CEZAR

ATTAQUA D'ENTRÉE

En première mi-temps, les amateurs de musique sud-américaine n'en avaient pas eu tout à fait pour leur argent ; tango argentin, néant. Onnis et Pastorizza très discrets. Noguès maladroit. La samba s'était résumée à un festival Paulo Cezar, épisodique comme toujours, mais très brillant.

Un but admirable de décontraction, un véritable coup de fouet, un tir sur le poteau et quelques passes de haute précision. Du grand art et du football efficace aussi.

De Jairzinho, dont on vous parlera longuement par ailleurs, on n'avait guère vu que la chevelure crépue.

Mais il faut de la patience en tout et même les plus grands joueurs ont besoin de préparer sérieusement une rencontre.

Pour le reste, l'équipe olympienne n'avait pas semblé habitée par l'inspiration et, une fois encore, on s'était réjoui de la présence rassurante de Trésor au centre de la défense.

LES PETITS DE MONACO

Sans faire de bruit, sans se masser en défense, équipe de Monaco avait produit pendant ces 45 premières minutes une impression favorable. Du petit jeu sans doute, mais plus précis que celui des Olympiens et partant plus efficace.

Heureuse surprise, les meilleurs joueurs de cette équipe étaient bien de chez nous. Dalger, en tête, Petit, Guignedoux, Gesdon, Samuel et l'ancien Aixois Chomet, qui avait la lourde tâche de marquer Jairzinho et qui s'en acquitta fort bien. On a fait beaucoup de cas de son tacle sur le fameux brésilien. Ne soyons pas ridicule. Dans le football moderne, pareille charge est une bagatelle. Jairzinho, au cours de la dernière coupe du Monde et même chez lui au Brésil en a vu d'autres.

ENFIN LE BONUS

Lancé par un penalty un peu généreux, mais pouvant s'admettre tout de même, la deuxième mi-temps allait justifier le qualificatif de gala accolé à la rencontre.

Une fois de plus c'est Paulo Cezar qui fit le principal pour l'O.M., orchestrant le jeu avec une diabolique habilité.

Écrire qu'il fut le No 1 de ce match est l'expression de la vérité. Personne ne nous contredira, c'est une certitude.

Jairzinho, bien que très loin encore de ses meilleures performances actuelles, nous parlons en connaissance de cause, n'en fut pas moins meilleur qu'en première mi-temps ; il faut lui laisser le temps de s'adapter, de se reposer et de s'entraîner.

En toute honnêteté sportive, il convient d'ajouter que l'A.S. Monaco, au cours de cette deuxième mi-temps, contribua grandement au spectacle. Que ses joueurs généraux et offensifs n'aient pas marqué au moins un but qui eut privé l'O.M. du bonus, ne tint souvent qu'à un fil. Peut-être aussi au fait qu'Onnis n'était pas dans un jour de réussite.

Et si l'Argentin ne se montra pas à son avantage, Dalger, l'ancien petit Toulonnais, fut tout simplement remarquable.

Si Paulo Cezar a été le roi incontesté de cette rencontre, il en fut, lui, le vice-roi. À l'attention de Stephan Kovacs.

Mais, enfin, tout est bien qui finit très bien pour l'O.M., auquel ce bonus va permettre de remonter quelques places au classement.

Maurice FABREGUETTES

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JAIRZINHO au téléobjectif

En réussissant à convaincre d'abord Paulo Cezar, puis Jairzinho de quitter Rio pour venir défendre les couleurs de l'O.M. le président Fernand Meric et ses amis du Comité directeur avaient tenté (et qui ne tente rien n'a rien) un fameux coup de poker.

Que valaient ces brésiliens, dont on disait le football très net déclin ? Que valait Paulo Cezar, que l'on savait plus souvent à quatre pattes que ballon pied pendant la dernière coupe du monde ? Que valait enfin ce Jairzinho à propos duquel les bruits les plus contradictoires, et surtout les plus pessimistes circulaient ?

Ces questions, bien sûr nous nous les posions. Hier soir, ils étaient plus de 35.000 à se les poser avec nous. Il est certes beaucoup trop tôt pour écrire que l'état-major olympien a gagné son pari, mais il n'est sans doute pas trop tard pour affirmer qu'il est sur le point de le gagner.

En toute chose, il convient garder les pieds sur terre. C'est ainsi que tous ceux qui étaient hier au rendez-vous de l'arène du boulevard marseillais, et ils étaient vingt mille de plus que lors du dernier match, n'étaient pas des inconditionnels. On leur avait promis du spectacle ; ils étaient prêts à s'enthousiasmer, à condition qu'on leur en donne. De ce côté, ils ont été servis au-delà de toute espérance.

C'est vrai, certains couperont des ballons en quatre en soulignant que la réplique n'était pas de tout premier ordre. D'autres diront qu'ils attendaient Jairzinho et que le véritable héros de la soirée fut Paulo Cezar. Tout cela est vrai, mais n'ont été déçus que ceux qui ont bien voulu l'être. En effet, était-il raisonnable de penser qu'un homme qui voilà à peine plus de 48 heures était chez lui au Brésil en plein été, réussisse ce numéro de haute voltige ? Il faut se mettre à sa place. Il était hier Marseille sur un terrain inconnu, devant un public inconnu, face à des joueurs inconnus, et avec des équipiers inconnus. Si l'on tient compte de tout cela, il ne fait pas l'ombre d'un doute que Jairzinho a rempli son contrat.

Il a marqué un but, en a donné un autre, et laissé entrevoir d'énormes possibilités. Il se dégage de ce joueur trapu, tout en muscles, volontaire, une formidable impression de puissance. Encore en petite forme, c'est vrai, il a laissé deviner les mille facettes d'un immense talent. Technique, rapidité, intelligence du jeu, avec et sans ballon.

Les amateurs de statistiques seront sans doute comblés lorsqu'on leur aura précisé que Jairzinho n'a manqué que quatre passes sur les 18 tentées. Les curieux apprendront peut-être avec plaisir ou étonnement que le nouvel avant-centre phocéen a tiré six fois aux buts, faisant mouche à une reprise, étant contré et trois fois et ratant deux fois la cage.

Les supporters, eux, seront ravis d'apprendre qu'il a offert deux balles de but, distillées avec une rare maestria, une à Victor Zvunka, qui enleva trop sa tentative de lob, l'autre à Emon qui fut contré in extremis par Montes.

Collectif, excellent équipier (on l'a vu se précipiter pour embrasser Emon qui venait de marquer un but), rageur et volontaire, il n'a cessé d'appeler, tout au long du match, le ballon et d'agiter ses bras pour conseiller ces nouveaux équipiers.

Jairzinho sera peut-être demain l'idole des supporters marseillais. Pour l'heure il a fait ce que nous attendions de lui. On a parlé, à propos du tandem Paulo Cezar - Jairzinho, de l'équivalent de l'échelle marseillaise de Cruijff et Neeskens. Nous en sommes pas encore là, c'est vrai, mais les deux Brésiliens, c'est sûr, jetterons le désarroi dans plus d'une défense française.

Ventura Fihlo Jairzinho a marqué hier un but. Celui qui a donné à l'O.M. son premier bonus de la saison. Autant admettre qu'en l'occurrence, il s'agit d'un heureux présage.

André de ROCCA

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Ils disent

JAIR : "Fabuleux public marseillais

L'ambiance était extraordinaire hier soir au Stade-Vélodrome.

Mais elle l'était plus encore une fois que la troupe olympienne victorieuse se fut rendue aux vestiaires. Jairzinho, la vedette du jour était mitraillé par les photographes. Et le sourire qu'il portait sur les lèvres indiquer qu'il n'était pas mécontent de cette première expérience sous les couleurs de l'O.M.

"Alors, Jair, votre première impression ?

- "Eh bien, nous avons gagné. J'ai moi-même marquer un but. J'ai contribué aussi au penalty. Dans l'ensemble et pour une reprise, je crois que ce n'est pas trop mal. N'oubliez pas que je n'ai plus joué au football depuis trois mois. Pendant toute cette période, j'ai participé à un seul match, contre Vasco de Gama. Et, avant de me rendre à Marseille, je me suis entraîné que pendant deux jours en compagnie de Claudio Coutinho. C'est assez peu, vous en conviendrez, pour être dans la meilleure condition. Je voudrais signaler aussi qu'il faut un certain temps d'adaptation pour tout joueur qui arrive dans une nouvelle équipe. Il faudra que nous nous comprenions mieux avec mes nouveaux partenaires. Mais à mon avis, cela ne devrait pas tarder".

"Que pensez-vous du public ?

- "Il est tout simplement fabuleux. Je crois que, ce soir, les spectateurs ont contribué largement à notre victoire. Quand on se trouve sur le terrain et que l'on entend tous ces encouragements, on est obligé d'avoir du coeur à l'ouvrage. Avec de tels spectateurs, je voue l'ai dis déjà l'O.M. ne peut nourrir les plus belles ambitions nationales".

Nous avons ensuite demandé l'avis de Paulo César qui fut, pour sa part, héros de la soirée.

"Pendant les 30 premières minutes de la première mi-temps, nous dit-il, je croyais que nous allions nous acheminer vers un succès facile. Puis Monaco a réagi. Heureusement tous mes camarades étaient ce soir en bonne forme et nous avons pu finalement obtenir notre premier bonus de la saison. Je pense sincèrement que nous ne resterons pas là. L'équipe vient de prendre confiance. Et lorsque Jairzinho aura trouvé son meilleur rythme, nous serons tous ensemble un réel danger pour les défenses adverses. Je suis à ce propos, très content pour mon ami qui a réussi à marquer un but pour ses débuts marseillais".

M. MERIC :

"LA FERVEUR RETROUVÉE"

M. Meric, pour une fois qui n'est pas toujours coutume, était rayonnant après la victoire de ses joueurs :

"Nous enlevons notre premier bonus. 35.000 spectateurs étaient au stade ; nous avons réalisé une bonne recette. Paulo Cezar était remarquable et Jair a tout de même réussi à trouver ses qualités de buteur. Que demander de plus ? Vous avez donc devant vous un président comblé. D'autant plus que la ferveur populaire, retrouvée ce soir au stade-vélodrome, et le meilleur encouragement pour les dirigeants que nous sommes. Maintenant n'oublions pas que chaque match est une nouvelle épreuve. Nous avons gagné ce soir. Mais il ne faudra pas se laisser gagner par l'euphorie. Il reste beaucoup de rencontre à enlever pour que l'O.M. retrouve lui aussi les sommets".

JULES ZVUNKA :

"UN ENTHOUSIASME ENCOURAGEANT"

Nous avons ensuite interrogé Jules Zvunka pour avoir son sentiment après cette partie fertile en émotions fortes.

"Il est certain, nous a dit l'entraîneur, que Jair manque encore de compétition, mais il a prouvé que ses qualités de buteur sont intactes ; dans quelques jours, je suis certain que nous reparlerons de lui. Ce qui importe surtout à travers cette rencontre c'est que j'ai eu l'impression qu'un nouvel enthousiasme, d'une nouvelle vie si vous voulez, qui a animé mon équipe, cela aussi c'est très important."

Mario Zatelli était sorti de sa retraite pour venir spécialement à ce match de gala :

"Je suis venu pour la première fois, nous a dit Mario, et l'O.M. a remporté son premier bonus. Donc, pas de problème, je reviendrai".

Enfin Josip Skoblar, lui aussi, n'avait pas voulu manquer ce match : il était même à la tribune d'honneur, à côté du président Meric pour ne rien perdre de l'événement.

"Paulo Cezar a été formidable, nous a-t-il déclaré. L'O.M. dans son ensemble, a fait aussi un très bon match. Jairzinho manque encore de compétition, mais, vous verrez, c'est un joueur de grand talent."

Signalons que Robert Buigues qui a du cédé la place à Lemée au début de la rencontre, souffre d'une entorse à la cheville. Il devra passer une radio, car les soigneurs, hier soir, craignaient un arrachement osseux.

En somme, c'était la seule fausse note de cette soirée enthousiaste.

Jean FERRARA

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Muro : "Cezar, quel phénomène"

Dans leurs vestiaires, les Monégasques n'étaient pas accablés. Ils avaient été battus par plus fort que. L'entraîneur Alberto Muro nous a fait une analyse très objective de la rencontre : "Nous n'avons pas effectué notre match habituel. Nous n'avions pas de bon jeux collectif ; et puis Pastoriza n'était pas en possession de tous ses moyens. Il souffre encore d'une tendinite. Mais il est évident que nous avons été très faibles dans les lignes arrières. Cezar, qui est un phénomène, s'en est rapidement aperçu et on a pu constater qu'il l'avait vu puisque, à la fin de la rencontre, il s'est déporté sur l'aile gauche !"

Le directeur sportif, Ruben bravo, était soucieux : "Depuis la saison dernière, nous avons des ennuis avec notre défense. Réellement, nous prenons trop de buts. Certes, le milieu et l'attaque vont bien, mais alors derrière, c'est désespérant !

Ce match a été marqué par l'empreinte de Cezar, un super-joueur. Il a énormément de qualités. Nous l'avons vu rapide, clairvoyant, efficace. C'est vraiment un super-joueur".

Quant à Chomet, il portait le jugement suivant sur les deux Brésiliens de Marseille : "Je n'ai pas eu trop de problèmes avec Jairzinho qui, sans aucun doute, manque de compétition. Mais je trouve que son compatriote Cezar est beaucoup plus dangereux car il a un style plus fuyant. On dirait souvent une anguille !"

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Le fait du match

Le bonjour de Paulo

Avez-vous déjà vu en France 35 000 spectateurs assister à un match de football qui oppose le 10ème au 15ème du championnat ? Eh bien, ce phénomène -car s'en est un - s'est produit hier soir au stade-vélodrome de Marseille. Une foule qu'on avait failli perdre, et qui s'est retrouvée comme par enchantement. Tout cela par la magie d'un nom, d'un homme qui porte, il est vrai, un titre de champion du monde sur sa carte de visite.

Vous avez reconnu le célèbre Jairzinho, moins connu sous le nom de Ventura Fihlo. Et le plus fort, dans l'histoire, c'est que tous ces spectateurs n'ont pas eu à regretter leur déplacement. Bien sûr Jairzinho, encore en petite condition physique, n'a pas réalisé des prouesses. Un seul but à son actif, mais c'était celui du premier bonus. De toute façon, si le public attendait Jairzinho, il n'a pas été déçu par l'exhibition de son compère, Paulo Cézar, lui, a littéralement crevé l'écran, hier soir, sur la pelouse du stade-vélodrome. Il fut à la base de cette nette victoire méritée. Mais les talents de Cézar étaient bien connus des supporters. Le véritable fait saillant de cette rencontre et cet engouement populaire qui a porté toutes les forces vives d'une cité autour d'un terrain de football.

Paulo Cézar nous a donné le bonjour, Jairzinho, en quelques actions, à laisser entrevoir quelques facettes de son talent. Et l'O.M., comme le soulignait Jules Zvunka, a puisé dans l'affaire un nouvel enthousiasme. Ce sera peut-être le plus bel en enseignement de cette chaude soirée.

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