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Résumé Le Provencal

du 14 septembre 1974

 

Le Roi POKOU à la dernière seconde !

L'O.M. trop défensif à Rennes battu sur un coup de dés (0-1)

RENNES - On était inquiet avant le coup d'envoi. L'O.M. à Rennes, sans Paulo César et sans Vanucci, également sur une pelouse et sous un ciel typiquement breton, voilà qui n'incitait pas à l'optimisme.

Notre inquiétude ne dura pas longtemps, car on ne tarda pas à s'apercevoir que l'équipe rennaise, du moins hier soir, se résumait à une seule grande étoile. Pokou, perdu dans les nuages et la grisaille environnante.

Pour le reste, le néant. Aucun jeu collectif, ce qui surprit de la part de cette équipe jadis réputée par la vitesse de son jeu, et un nombre de maladresses tellement excessives qu'il vaut mieux croire que le Stade Rennais se trouvait hier soir, dans un très mauvais jour.

Dans ces conditions, il suffisait à l'O.M. de bien se battre, avec beaucoup d'abnégation et un esprit de corps remarquable, pour mériter le partage des points, jusqu'à quelques secondes de la fin.

Au moment où le roi Pokou surgit sur un centre de la gauche, pour tromper tout le monde, et marquer le but que lui-même méritait très largement.

À ce moment, le résultat était inespéré pour l'O.M. et pourtant les Olympiens auraient aussi bien pu l'emporter, car ils eurent aussi de nombreuses occasions. On peut même penser que Skoblar, s'il ne s'était pas émoussé en se battant durant toute la partie au milieu du terrain, aurait pu porter un coup décisif à ses adversaires au moins deux fois.

Mais il faut savoir ce que l'on veut, et hier l'O.M. en visant trop visiblement le match nul, a finalement été battu sur un coup de dé de la dernière seconde.

POKOU, QUELLE CLASSE !

La première mi-temps avait été essentiellement marquée par les exploits de Pokou, et un festival de coup de sifflets donnés par l'arbitre M. Didier.

Laurent Pokou est vraiment un footballeur de très grande classe. Victor Zvunka n'a pu rien, ou pas grand chose devant lui, et Trésor dut plusieurs baissait pavillon devant son frère de couleur. Les dribbles lents, les contre-pieds, exécutés en pleine vitesse - et quelle vitesse ! - de l'Ivoirien de Rennes furent une pure merveille. C'est en plus un footballeur complet, très collectif, qui sait voir ses partenaires, et leur passer le ballon au moment opportun. Le drame pour Rennes jusqu'à la fin de la rencontre, fut qu'aucun de ses partenaires n'ait pu rendre à Pokou tous les services que lui-même rendait aux autres.

Malheureusement et heureusement pour l'O.M., le même joueur de saurait être à la fois à la passe et à la réception. Vérité élémentaire du football. Un très grand joueur est toujours perdu dans une équipe moyenne.

LES MALHEURS DE LEA

L'O.M. rendu prudent par l'absence de Paulo César avait choisi de renforcer son milieu de terrain. C'est ainsi que Skoblar et Emon furent plus souvent en position d'intermédiaires qu'en position d'attaque.

Cette tactique de circonstance eut pour résultat de laisser le bras, et vaillant Sikely presque toujours seul en pointe. Une lourde tâche pour lui, d'autant que la défense rennaise resta toujours vigilante et groupée.

Toujours au cours de cette première mi-temps, on avait constaté un nombre inhabituel de mauvaises passes de part et d'autre. Certes, la pelouse rendait le ballon fusant, mais cela n'excuse pas tout de la part de joueur professionnel de première division. Pour tout dire, football avait volé assez bas.

Quant au héros malheureux de cette première période, il s'est appelé Léa. Lequel, avec une régularité désarmante avait saccagé les meilleures occasions de son équipe.

Mais enfin, 0-0 à la mi-temps l'O.M. avait déjà réglé la moitié de son contrat.

EN 2e MI-TEMPS TOUT ÉTAIT POSSIBLE

Au cours de la deuxième mi-temps, tout était possible. Le roi Pokou multiplia encore les exploits, et l'on commençait à dire "dommage pour lui" quant tout à fait en fin de rencontre, il réussissait à forcer le blocus olympien.

Il est certain qu'au cours de cette rencontre l'équipe de l'O.M. omnibulée par l'absence de Paulo César, à jouer de façon peut-être excessivement prudente.

Après avoir redouté le pire en début de match, les Olympiens se rendirent pourtant assez vite compte que leurs adversaires n'étaient pas dans un bon jour hier soir, ils étaient de classe simplement moyenne.

Peut-être auraient-ils pu dans ces conditions et cette constatation faite, faire preuve un peu plus d'audace. On peut penser que le fait d'avoir obligé Skoblar à se battre au milieu du terrain a été une erreur. À son âge, Josip ne peut pas tout faire, comme Pokou, être au four et au moulin. Et l'on peut justement penser qu'un Skoblar un peu moins émoussé aurait pu faire la différence.

Mais enfin, les choses étant ce qu'elles sont il faut constater que l'équipe olympienne sans Paulo César, est réduite à pas grand-chose. Un ensemble courageux, combatif ne méritant que des félicitations sur le plan moral, mais semblant très limité, il faudrait en tenir compte à l'avenir.

Maurice FABREGUETTES

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Le président MERIC déçu

La porte des vestiaires marseillais était fermée, alors que l'arbitre avait sifflé la fin du match depuis un bon moment. C'est là que nous avons trouvé le président Meric, visiblement abattu :

"Je vous avoue, devait-il dire, que je suis déçu. Perdre de cette façon, c'est vraiment bête, (le président utilisa même un autre terme que nous ne pouvons pas décemment répéter ici). Je crois d'ailleurs que le match n'a pas été bon, ni d'un côté, ni de l'autre. Comme quoi, il reste encore beaucoup de travail à faire pour que nous puissions jouer les premiers rôles".

Sur ces entrefaites, on nous laissa pénétrer dans les vestiaires marseillais. Comme on s'en doute, on aurait entendu une mouche voler. La déception était d'autant plus grande que quelques dix minutes plus tôt, Trésor et ses équipiers pensaient bien revenir marseillais avec dans leur valise, le point du match nul. Le capitaine marseillais, le sympathique Marius, était l'un des plus abattu.

- "C'est pas vrai ; C'est pas vrai".

Jules Zvunka n'en menait pas large, mais dut faire contre mauvaise fortune bon coeur et répondre aux questions des journalistes :

- "Comme quoi un match dure 90 minutes et non pas 89.50 ; nous sommes tous très déçus, car non seulement nous ne devions pas perdre, mais une victoire était également à notre portée. Pensez, si quelques secondes avant que Pokou ne marque, Skoblar a raté un but qui paraissait acquis et puis voilà, dans la dernière minute..."

Paolo César lui aussi prostré, expliquait :

- "C'est ça le football ! J'ai trouvé que mes camarades ont bien joué le coup, surtout en deuxième mi-temps. Ça fait mal au coeur de perdre une partie dans ces conditions".

Lemée lui, pestait :

- "En 90 minutes, Perriault n'a pas centré une seule fois. Il a fallu que dans les dernières secondes, son seul centre soit celui qui amène le but. Il faut avouer que le pourcentage de réussite est impressionnant".

Quant à Bracci, il ne s'expliquait pas la défaite.

- "C'est pas possible, à une minute près, on pouvait gagner. Je ne sais pas vraiment ce qui s'est passé. Sur ce but, j'ai vu tout le monde, sauter, tout le monde crier et puis, en voyant le ballon au fond des filets, j'ai compris que tout était perdu pour nous. Peut-être avons-nous réalisé trop tard que c'était un match à notre portée".

En conclusion, dans les vestiaires marseillais. Où l'on reconnaissait que Laurent Pokou avait fait au sein de l'équipe rennaise un très grand match, on pensait aussi que si Paolo César avec pu s'aligner, peut-être le résultat eût-il été inversé. Mais ceci est une autre histoire.

André DE ROCCA

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KERUZOPRE : Victoire normale

Comme on s'en doute, dans les vestiaires rennais c'était une toute autre ambiance que dans ceux de l'O.M. Nous sommes allés directement voir Raymond Keruzore qui, l'an dernier, portait le maillot olympien.

Très gentiment, le capitaine du Stade Rennais nous a donné ses impressions : "Je suis sorti à la mi-temps, car j'ai été victime d'un claquage : Pour ce qui est de la rencontre, je dois vous avouer que je trouve le résultat tout à fait normal... Ce ne fut certes pas un grand match que les deux équipes ont joué, mais de part et d'autre, il y a eu de nombreuses occasions. Dans la mesure où nous avons su en exploiter une, je ne crois pas que nous ayons à rougir de notre victoire. Je suis bien sûr peiné pour l'O.M., mais croyez-moi, en tant que Rennais je suis satisfait". On le serait à moins.

Très entouré également le "vétéran" Cosnard dont c'était la rentrée, faisait une analyse que nous trouvons juste : "Je ne crois pas que ce soir Rennes ait fait un grand match disait-il. Individuellement notre équipe est sûrement aussi forte que celle des années précédentes, mais il me semble que nous manquons de fonds de jeu. C'est là que nous devons travailler pour jouer un rôle intéressant cette saison".

A. de R.

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Les réponses aux questions

que vous vous posez

Q. - La présence de Paulo César aurait-elle inversé le résultat du match ?

- Bien entendu, chaque fois que le Brésilien ne jouera pas, on se posera cette question. Il est certain que Paulo Cesar aurait, hier soir, brillé de mille feux dans la mesure où les défenseurs rennais ne jouèrent pas trop rudement et dans la mesure où le rythme ne fut jamais très vif. Ceci dit, il est difficile de préciser si sa présence aurait été décisive quant au résultat final.

Ce qui est sûr, c'est que son duel à distance avec Laurent Pokou (un sacré joueur celui-là) n'aurait pas manqué de piment. Peut-être les spectateurs marseillais auront-il le privilège d'assister à ce duel pour le match "retour".

Q. - Keruzore est-il redevenu le grand Keruzore ?

- Il est bien difficile de juger Raymond sur ce que nous lui avons vu faire hier puisque, nous l'avons dit, il se blessa pratiquement début de match, tout au moins après une vingtaine de minutes de jeu. Jusqu'à là, il faut bien le dire, le Breton n'avait pas brillé de mille feux. Il s'était dépensé sans compter, c'est vrai, mais il avait beaucoup couru, ce fut souvent dans le vide.

À vrai dire, il ne fait pas l'ombre d'un doute que Keruzore n'a pas retrouvé le coup de rein et la vista, que voici trois ans, en faisaient un des meilleurs voir le meilleur joueur de milieu de terrain français.

Q. - Le public breton est-il pour quelque chose dans la défaite marseillaise ?

- Absolument pas. Nous avions rarement vu dans le passé les spectateurs du stade de la route de Lorient aussi calmes. Il est vrai que la faute en incombe aux joueurs des deux équipes puisque aussi bien jamais le match ne fut véritablement passionnant. Est loin d'avoir contribué au succès du stade rennais, se public fut tout surpris lorsque, dans les ultimes secondes, Pokou marqua le but de la victoire.

Q. - La défense marseillaise qui a résisté 90 minutes a-t-elle fait un très grand match ?

- Bien entendu, on ne peut pas dire que Trésors et ses camarades ont mal joué. Par contre, ce qui est vrai, c'est que jamais ils ne furent pressés dans leurs bois comme cela arrive souvent à l'extérieur. Bref, les attaquants rennais, à l'exception de Pokou, furent bien timides ou bien maladroits à l'exemple de Léa. Pour ce qui est du but, sur ce long centre de Perriault, on partagera la faute entre Charrier, qui fut sans doute surpris par un ballon devenu glissant au fil des minutes, et ses défenseurs qui laissèrent Pokou sauter comme il le voulut. Mais, dans l'ensemble, la défense marseillaise - c'est désormais une habitude - est à créditer d'un bon match.

A. DE R.

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La solitude d'un trop grand joueur

Laurent Pokou a plané de très haut sur cette rencontre.

Mais malgré la sympathie que nous avons pour l'O.M. et le désir qui était en nous de voir l'équipe de M. Meric, de Victor Zvunka, etc... obtenir le partage des points, nous n'avons pu nous empêcher de plaindre l'avant-centre de Rennes.

Un trop grand joueur se trouve seul, absolument seul, dans une rencontre trop médiocre pour lui. Ce qu'a pu faire hier soir Laurent Pokou est tout à fait admirable : ses dribbles, ses courses, ses appels de ballons et même ses passes à ses partenaires furent des modèles du genre, mais on ne lui rendit jamais ce qu'il donnait pourtant aussi généreusement.

Nous nous souvenons de l'avoir vu, au cours de cette rencontre, passer sur la gauche ou sur la droite, laisser sur place Victor Zvunka, esquiver la charge de Trésor et terminer tout cela par une passe admirable au centre du terrain, une passe hélas pour personne.

À plusieurs reprises également, un de ses partenaires débordant sur la droite ou sur la gauche, il partit à toute vitesse pour se mettre en position de tir ou de reprise ; hélas, une fois encore, le ballon passait trop à droite, trois à gauche, trop en l'air, trop à ras de terre.

Dans une bonne équipe entouré de joueurs précis, Laurent Pokou aurait certainement, hier soir, marqué au moins trois buts. On nous avait dit qu'il avait raté le début de sa saison par manque de forme. Sur ce que nous avons vu hier soir, c'est absolument inexact. S Laurent Pokou a raté son début de saison, c'est par suite du manque de partenaires de classe.

Il est vraiment dommage de voir un joueur de cette pointure, d'une pareille valeur, jouer dans une équipe aussi médiocre que celle de Rennes.

M.F.

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(Photo : Collection personnelle Matthieu Lecharpentier)

 

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